La Chine possède bon nombre d’espèces endémiques dont l’une des plus célèbres, le panda géant, connait tous les honneurs. Phénomène des réseaux sociaux, l’ursidé bicolore a les faveurs du public et est devenu en quelques années la mascotte officieuse de l’Empire du Milieu. Cette semaine, la Chine annonce la création d’une réserve naturelle aux dimensions pharaoniques pour le panda géant.
En septembre 2016, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature mettait à jour sa liste rouge des espèces menacées et ramenait Ailuropoda melanoleuca, le panda géant, au stade d’animal vulnérable, alors qu’il séjournait depuis 1990 dans la catégorie « en danger ». Cette décision faisait suite à l’augmentation du nombre de spécimens remarquée lors de l’enquête nationale menée entre 2011 et 2014. De nos jours, l’espèce compte presque 300 individus de plus qu’il y a 10 ans, soit 1 864 pandas géants dans la nature. Problème : les animaux sont répartis en 33 sous-populations isolées les unes des autres et réparties sur presque 200 villages. En pratique, comme il s’agit d’animaux qui n’aiment guère la présence de leurs congénères, ce n’est pas gênant… sauf bien sûr en période de reproduction, quand il faut traverser routes et villages pour atteindre un autre panda géant.
C’est notamment pour régler ce problème que la Chine vient d’annoncer la création d’une réserve naturelle de 27 134 km². A titre de comparaison, la Belgique mesure 30 528 km². Ce sanctuaire gigantesque regrouperait en fait 67 parcs plus petits, abriterait également 8 000 autres espèces animales et végétales en danger et relierait trois provinces. Seulement voilà, au milieu de ces 27 134 km² se trouvent des Hommes ; environ 170 000 que le gouvernement a tout simplement prévu de déplacer.
Pourquoi ce corridor géant peut être bonne idée ?
Les pandas ont un cycle de reproduction très compliqué. La femelle n’est féconde que deux à trois jours par an et sur ce laps de temps, si un congénère mâle ne se trouve pas à bonne distance, ce n’est pas la femelle qui ira le chercher ! La fragmentation des individus est donc un frein évident à la naissance de petits.
Nouveau point positif : l’une des menaces les plus importantes qui pèse sur le panda géant est la destruction de son habitat. Ailuropoda melanoleuca vit entre 1 500 et 3 000 mètres d’altitude, dans des forêts montagneuses très riches en bambou. Des territoires qui sont maintenant gagnés par les Hommes et défrichés pour devenir des terres agricoles ou de pâturage. La création de cette réserve permettrait donc de protéger l’habitat du panda géant et par la même occasion celle de milliers d’autres espèces.
Enfin, un autre problème résulte de la fragmentation de l’espèce : la consanguinité. Ce corridor protégé entre les différentes sous-populations permettrait un brassage génétique plus important et ainsi peut-être de sauver génétiquement parlant l’espèce une fois pour toutes.
Quelles raisons de rester sceptique ?
Certes, il n’y a pas d’espèce menacée plus ou moins importante qu’une autre, chacune ayant sa place dans la chaîne de la biodiversité et il convient également de rappeler que la création d’une zone protégée aussi grande bénéficiera à d’autres espèces que le panda géant. Toutefois, certains pourront s’étonner du déploiement de moyens en faveur du panda géant. Symbole de la Chine, espèce magnifique et adorée du public, il ne peut suffire à faire oublier les fermes de tigres et d’ours, le braconnage des pangolins ou l’extinction officieuse du dauphin de Chine, autant d’espèces qui mériteraient elles aussi un tel dispositif.
Cette annonce demeure évidemment forte de sens et s’inscrit, chose assez rare pour être notée, dans une démarche de protection de la biodiversité et non de l’Homme. Il reste donc évidemment de quoi s’en satisfaire. Gageons simplement qu’il s’agit là d’un premier pas en faveur d’un plan global de protection de l’environnement et non d’un point final.
0 réponse à “Pour son panda, la Chine voit géant !”