
Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Nature Communications, même si la vie océanique pourrait éventuellement s’adapter aux changements climatiques majeurs, une évolution rapide dans un monde soudainement chaud pourrait avoir des coûts imprévus. Ainsi, même si la plasticité peut faciliter la survie initiale dans des conditions de changement global, elle pourrait s’éroder une fois les populations adaptées, limitant ainsi la résilience aux nouveaux facteurs de stress et aux environnements auparavant inoffensifs.
Afin d’évaluer comment les organismes marins s’adaptent au changement climatique sur plusieurs générations, les scientifiques ont utilisé des copépodes (Acartia tonsa) comme étude de cas. Puisque cette petite et humble créature marine se reproduit, mûrit et crée une nouvelle génération en une vingtaine de jours, il faut moins d’un an pour que vingt générations s’écoulent.
Les scientifiques ont exposé des milliers de copépodes aux températures élevées et aux niveaux de dioxyde de carbone prévus pour l’avenir des océans, et ont examiné ce qui est arrivé à ces créatures au fil des vingt générations. Ensuite, ils ont pris certains organismes marins et les ont ramenés aux niveaux de température et de dioxyde de carbone dans lesquels la première génération avait commencé, et les ont observés au fur et à mesure que trois générations supplémentaires passaient.
Les résultats ont montré que ces créatures ont la capacité génétique de s’adapter sur vingt générations, évoluant pour maintenir leur forme physique dans des environnements radicalement modifiés (un processus appelé « plasticité phénotypique »). Les chercheurs ont observé de nombreux changements dans les gènes des copépodes liés à la façon dont ils géraient le stress thermique, développaient leurs squelettes dans des eaux plus acides et produisaient de l’énergie, ce qui suggère qu’ils peuvent être très résistants au réchauffement et à l’acidification rapides.
Cependant, la flexibilité qui a permis aux copépodes d’évoluer sur vingt générations a semblé s’éroder lorsqu’ils ont tenté de les ramener dans ce qui était auparavant leur environnement normal. Ramenés aux températures et aux concentrations de dioxyde de carbone initiales, les copépodes étaient en moins bonne santé et produisaient des populations plus petites. Bien qu’ils aient pu, après trois générations, réévoluer vers leurs conditions ancestrales, les organismes marins ont néanmoins perdu la capacité de tolérer un approvisionnement alimentaire limité et ont montré moins de résilience face à de nouvelles formes de stress.
« Si les copépodes ou d’autres créatures doivent emprunter cette voie d’adaptation – et utiliser une partie de leur variation génétique pour faire face au changement climatique – seront-ils capables de tolérer un nouveau facteur de stress environnemental, un autre changement dans l’environnement ? s’est demandé l’auteur principal de l’étude, Melissa Pespeni, biologiste à l’Université du Vermont. Cette étude suggère que ce n’est peut-être pas si facile.
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Par Andreï Ionescu, Espèces-menacées.fr Rédacteur
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