L’année 2018 sera-t-elle celle du combat contre la pollution plastique ? Les journées mondiales de l’environnement, ce 5 juin, et des océans, le 8 juin, ont en tout cas choisi de mettre en lumière cette problématique pour éveiller les consciences. Il faut dire que le phénomène prend de l’ampleur.
Le plastique, des rivières à l’océan
Les sociétés modernes consomment le plastique sans modération. Toutes les minutes, 1 million de bouteilles en plastique sont vendues dans le monde et on utilise 500 milliards de sacs plastiques tous les ans. Le plus grave étant que sur tous les produits fabriqués dans cette matière, plus de la moitié est à usage unique comme les pailles, les sacs, les emballages ou encore la vaisselle jetable. Or, le plastique le plus utilisé à l’heure actuelle est le plastique PET ou PETE, pour « Polyéthylène Terephthalate », un composé de polymères, des dérivés du pétrole. C’est le plastique de nos bouteilles de sodas et d’eau minérale par exemple. Bien que recyclable, ce plastique termine trop rarement dans un centre de tri mais plutôt dans la nature et, de plus en plus, dans les océans. Laissés dans la nature ou déversés directement dans les cours d’eau, ces déchets sont charriés par les pluies et les courants jusqu’aux rivières puis aux fleuves et terminent leur course en toute logique dans l’océan. Là, une bouteille met en moyenne 400 ans à se décomposer en particules tout aussi nocives pour la biodiversité.
Huit millions de tonnes de plastiques sont déversées chaque année aux quatre coins du monde toutefois, cinq pays sont responsables de 60% des déchets océaniques (cf, infographie ci-dessous). Aujourd’hui, on estime que 150 millions de tonnes de déchets plastiques flottent dans les océans et, que si rien ne change, il y aura plus de plastiques que de poissons d’ici 2050.
Le microplastique, un fléau irréversible
Même dégradés, les déchets plastiques restent une menace pour la faune marine. En effet, ils se décomposent en petites particules de moins de 5 mm que l’on appelle « microplastiques ». Ces débris restent en suspension dans l’eau et sont souvent ingérés par des poissons qui les confondent avec du plancton. Une étude publiée en 2014 révèle qu’il en existerait déjà plus de 5 000 milliards dans les océans. Et le danger ne s’arrête pas là puisque sous les effets du soleil et des rayons UV combinés à l’oxygène, le microplastique se dégrade en particules encore plus petites, invisibles à l’œil nu, et dont on a ignoré l’existence pendant longtemps. Un seul débris de microplastique peut produire plusieurs centaines de milliards de nanoparticules, c’est dire leur nombre dans l’océan !
1 400 espèces marines touchées
La pollution plastique des océans menace directement 1 400 espèces marines comme les requins (dont le requin marteau), les baleines (dont la baleine bleue), les otaries, les dauphins, les tortues, etc., ainsi que de nombreux oiseaux comme l’albatros des Galápagos, en danger critique d’extinction. Les déchets qui dérivent au large viennent parfois entraver les animaux marins, les empêchant de se déplacer ou de respirer convenablement. « Lorsque j’ai navigué avec Sea Shepherd, notamment lors de l’opération Milagro pour sauver le vaquita, il m’est arrivé de retrouver une tortue marine avec une paille de 15 cm enfoncée dans la narine », raconte par exemple Julien Wosnitza, ex-Sea Shepherd, auteur du livre « Pourquoi tout va s’effondrer » et fondateur du projet « Wings of the Ocean ». D’autres fois encore, les animaux confondent ces débris avec des proies potentielles, comme des méduses par exemple. Ils les avalent et meurent étouffés ou par obstruction de leur système digestif, comme cela a été le cas début juin 2018 pour une baleine pilote qui est morte en Thaïlande après avoir ingurgité 80 sacs plastiques. Tous les ans, 100 000 mammifères marins et 1 million d’oiseaux meurent à cause du plastique.
Dépolluer les océans
L’une des solutions pour éviter que la pollution plastique ne devienne insurmontable pour la faune et la flore marine consiste à nettoyer les océans. Plusieurs projets ont été ou sont en train d’être montés en ce sens. En voici trois particulièrement innovants.
Le projet The Ocean Clean Up
Imaginé par un jeune néerlandais, Boyan Slat, le projet « The Ocean Clean Up » part d’un constat simple : puisque le gros des déchets se concentre dans cinq grandes zones sur Terre – poussés par les courants océaniques, ils s’agglutinent dans des zones bien précises et forment ce que l’on appelle le « Septième continent » – il suffit d’aller les récupérer à ces endroits-là. Et pour faciliter le travail, Boyan Slat a imaginé un système de barrages flottants de 1 à 2 km de long capable de retenir les détritus en un même endroit. Un bateau passera ensuite régulièrement pour prélever la masse d’ordures et l’envoyer dans un centre de tri. Le projet a pour but de réduire de moitié la taille du plus grand de tous ces vortex, situé dans l’océan Pacifique entre la Californie et Hawaï (actuellement, ce continent de plastique est grand comme trois fois la France !). D’abord en test dans la baie de San Francisco, ce projet devrait démarrer in situ courant 2019. Le fondateur de The Ocean Clean Up espère récupérer 40 000 tonnes d’ici 2023.
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The Sea Cleaners et le projet Manta
C’est pendant un tour du monde à la voile que le skipper suisse Yvan Bourgnon s’est rendu compte de l’ampleur du phénomène. « Pendant que je naviguais en Asie du Sud-Est, je devais stopper le bateau toutes les 15 minutes pour récupérer les déchets flottants », confie-t-il. A son retour, il tire la sonnette d’alarme et décide de créer un projet innovant pour dépolluer les océans : le projet Manta. Il s’agit d’un quadrimaran équipé d’éoliennes et de panneaux solaires, quasi-autonome en énergie renouvelable et doté de trois collecteurs de déchets. Ceux-ci récupéreront les débris jusqu’à un centre de tri où des équipes sépareront les déchets organiques des déchets plastiques. Tout sera ensuite compacté en cubes de 1 x 1 m et envoyé au recyclage une fois à terre. « Le temps où nous ne serons pas en mer, nous l’utiliserons pour sensibiliser les populations », complète Yvan Bourgnon. Au total, le Manta pourra transporter 250 tonnes de déchets plastiques à chacun de ses voyages. Si les fonds nécessaires sont réunis, le début de la construction est prévu en 2021 pour un départ sur les mers en 2023.
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Wings of the Ocean
Julien Wosnitza est, lui aussi, convaincu que le ramassage des déchets plastiques est une nécessité. Après avoir vogué pour Sea Shepherd en mer de Cortez et effectué plusieurs missions humanitaires dans les Caraïbes, ce jeune homme de 24 ans est arrivé à la conclusion que « Tout va s’effondrer ». C’est d’ailleurs le titre de son livre publié le 16 mai aux éditions Les liens qui libèrent. Mais la chute qui nous attend peut être moins douloureuse, « à condition d’agir maintenant ». C’est dans cette logique qu’il a créé le projet « Wing of the Ocean » (les Ailes de l’Océan). Le principe : affréter un voilier pouvant transporter marchandises, scientifiques et « éco-aventuriers » comme les appelle Julien pour naviguer sur l’Atlantique. L’occasion de récupérer les déchets plastiques croisés en chemin et d’exporter et importer des produits sans émissions de CO2. Le premier départ est fixé à septembre 2018.
Des gestes simples pour limiter la pollution plastique
A l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, ce 5 juin 2018, l’ONU a lancé une campagne #BeatPlasticPollution (Combattre la pollution plastique). Le principe : prendre un objet en plastique à usage unique et s’engager, face caméra, à ne plus l’utiliser. Des alternatives existent, comme par exemple « du plastique à base de chanvre biodégradable », nous explique Julien Wosnitza dans la vidéo. « Une bouteille en plastique de chanvre met 90 jours à se biodégrader et se transformer en nourriture pour les poissons ». Surtout, les Nations Unies veulent insister sur le fait que des gestes simples suffiraient à réduire efficacement la pollution plastique. Eviter le plastique à usage unique, les emballages inutiles et préférer des contenants réutilisables sont quelques exemples à appliquer au quotidien. De premiers pas vers une réduction du plastique.
par Jennifer Matas
4 Réponses to “La lutte s’organise contre la pollution plastique des océans”
04.05.2019
Damien LevaillantBonjour, il y a un peu plus d’un mois j’ai mis en ligne le site Innovations océans sans plastique: https://www.innovations-oceans-sans-plastique.com/ong.
Il a pour but de rassembler des explications sur la pollution plastique dans nos océans et d’y lister les ONG, associations et innovations permettant à tous de diminuer sa pollution plastique sans attendre l’aide des gouvernements. N’hésitez pas à y faire un tour et à m’aider à l’améliorer.
06.06.2018
VERSAVAUX MarieJe trouve que ce sont 3 grands et beaux projets mais il en existe d’autres qui fonctionnent déjà. Pourquoi ne pas contacter tous leurs auteurs et leur donner rendez-vous sur le 7ème continent afin de faire disparaître celui-ci ? Faites appel aux bénévoles (les vacances arrivent), il n’y en aura jamais assez. Invitez les associations à venir aider aussi. une initiative d’un jeune homme de 19 ans, Boyan Slat, a permis d’explorer une nouvelle piste. Il propose de capter les déchets grâce à des barrages flottants auto-alimentés par le soleil et la houle de l’océan. Son projet serait même rentable car le recyclage des matières plastiques récupérées pourrait rapporter, selon son équipe, 500 millions de dollars
07.06.2018
Jennifer MatasBonjour Marie, effectivement, il existe bien d’autres projets pour nettoyer les océans et lutter contre la pollution plastique. Il aurait été difficile de tous les réunir en un seul et même article ! Aussi, nous avons choisi de parler de trois d’entre eux qui sont en préparation et s’annoncent comme particulièrement innovants. Parmi ces trois projets, nous parlons d’ailleurs de Boyan Slat que vous citez et de son projet The Ocean Clean Up. Celui-ci est actuellement en test et devrait être déployé prochainement entre Hawaï et la Californie.
11.02.2019
JackOui effectivement il y a beaucoup de façons de sauver la planète