La dernière fois que nous vous parlions d’une saisie record de tortues radiées (Astrochelys radiata), c’était il y a moins d’un an lorsque les douanes malaisiennes ont intercepté 330 tortues endémiques de Madagascar. Un chiffre dérisoire en comparaison de la dernière découverte des autorités malgaches : mardi 10 avril 2018, 10 976 tortues rayonnées ont été trouvées au sud-ouest de la Grande île, ainsi que le rapporte l’association Turtle Survival Alliance (TSA).
Des tortues destinées au trafic illégal
C’est à Tuléar, ville du sud-ouest de Madagascar, que les reptiles ont été découverts. Ces milliers de tortues vivantes jonchaient le sol d’une maison, entassées les unes sur les autres au point qu’il était quasi impossible pour les autorités de circuler sans heurter une carapace. L’ampleur de cette découverte est immense. La bonne nouvelle, c’est que ces tortues en danger critique d’extinction ont pu être saisies avant de quitter le sol malgache, ce qui devrait faciliter le travail des enquêteurs pour démanteler le réseau. Généralement, les tortues radiées – dont le commerce est interdit par la Cites – sont expédiées illégalement vers l’Asie où elles sont ensuite vendues pour leur viande ou comme animaux de compagnie. Le plus souvent, ces animaux braconnés sur la Grande île transitent par la Malaisie, véritable plaque tournante du trafic illégal de tortues sauvages. Dans le cadre de cette affaire, trois personnes ont déjà été interpellées. La mauvaise nouvelle, c’est que cette saisie est si importante que les associations présentes sur place, TSA et SOPTOM, se retrouvent débordées par le nombre.
Placées temporairement
« La situation est catastrophique, nous ne savons pas comment nous allons faire », confie Bernard Devaux, cofondateur de l’association SOPTOM. A ce jour, le village de tortues d’Ifaty, un village côtier situé à une trentaine de kilomètres de Tuléar, a déjà reçu environ 5 000 tortues issues de la saisie, portant à 13 000 le nombre d’animaux hébergés sur son site de 35 hectares. « Certes, nous avons de la place, mais les spécimens en question sont tous des juvéniles qui ne peuvent être placés dans des enclos classiques. Il leur faut des enclos adaptés », explique-t-il. Mesurant une dizaine de centimètres à peine pour les plus gros gabarits, ces tortues ne pourront être relâchées en toute sécurité qu’une fois atteinte la taille de 12 à 15 cm.
Sans compter que l’on ignore encore leur état sanitaire, ce qui signifie qu’elles ne peuvent être mises en contact avec les autres pensionnaires. Ce que l’on sait, c’est qu’enfermées dans des pièces confinées et sans aucun soin, les tortues rayonnées ont été découvertes en mauvaise santé et souffrent de malnutrition et de déshydratation. Plus d’un millier d’entre elles ont d’ailleurs déjà succombé. Les 9 760 autres survivantes ont toutes besoin de soins. TSA a fait savoir que son équipe de Madagascar était actuellement mobilisée et que des renforts composés de vétérinaires et de soigneurs animaliers rejoindraient très prochainement les personnes en place.
Quel avenir pour les tortues saisies ?
« Dans l’idéal, nous aimerions réintroduire ces tortues dans la nature car c’est que nous faisons. L’an dernier, 770 tortues radiées et araignées ont ainsi été relâchées par notre équipe. Mais c’est à chaque fois une tâche compliquée », détaille l’ancien directeur de SOPTOM. D’abord, parce que les zones sauvages se font de plus en plus rares sur la Grande île, et puis parce que les autorisations nécessaires mettent souvent du temps à être accordées. Comme expliqué plus haut, il faut aussi s’assurer du bon état de santé des tortues avant de les relâcher pour éviter tout risque d’épizootie. Seule solution pour l’instant : « faire le nécessaire pour les accueillir dans les meilleures conditions possibles. » Pour cela, il faut commencer par les baigner, les nourrir et leur apporter les soins vétérinaires dont elles ont besoin. « Nous allons aussi construire le plus rapidement possible quatre nurseries, des sortes d’enclos grillagés et recouverts d’un filet pour les protéger des prédateurs », explique Bernard Devaux.
Besoin urgent de dons
Les associations SOPTOM et TSA travaillent de concert et ont toutes deux lancé un appel aux dons car les besoins financiers pour accueillir cet arrivage de tortues sont importants. « Nous aimerions recruter une personne supplémentaire pour nous aider et il va nous falloir des fonds pour construire les enclos et nourrir ces 5 000 tortues supplémentaires », souligne l’organisme français. Vous pouvez apporter votre contribution en faisant un don à l’association SOPTOM ou en participant à l’organisme international Turtle Survival Alliance.
par Jennifer Matas
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